"Tu es traducteur? Dis donc, tu dois parler beaucoup de langues!"

Quel traducteur, quand on lui demande ce qu'il fait dans la vie, ne s'est jamais entendu dire: "Tu es traducteur? Tu dois parler beaucoup de langues, alors!"?

Eh bien non! Ce n'est pas parce qu'on est traducteur qu'on parle plusieurs langues. Et j'ajouterai que l'inverse est également vrai: ce n'est pas parce qu'on parle plusieurs langues qu'on peut être traducteur. 

Le Gendarme à New York
Source: https://www.cnews.fr/divertissement/2018-09-19/dou-vient-la-celebre-phrase-my-taylor-rich-794617

Toute personne a une langue maternelle. Certains diront qu'on peut avoir deux langues maternelles, mais ça, c'est un autre sujet. L'objectif d'une traduction, c'est de créer un texte qui, quand il est lu, ne "sente" pas la traduction. Il faut que le lecteur, en lisant une traduction, ait l'impression qu'il lit un texte original. Et pour arriver à un tel résultat, il est impératif, pour le traducteur, de traduire vers sa langue maternelle. Ce n'est qu'ainsi qu'il sera en mesure de produire une traduction idiomatique

Langue active vs langue passive

Un traducteur a une langue active, à savoir sa langue maternelle, vers laquelle il traduit, et une ou plusieurs langue(s) passive(s), de laquelle ou desquelles il traduit. Il dispose d'une connaissance écrite active de sa langue active, mais "seulement" d'une connaissance écrite passive de sa/ses langue(s) passive(s). Entre d'autres mots, un traducteur sera capable de rédiger un texte de grande qualité dans sa langue active, mais il lui sera extrêmement difficile d'en faire de même dans sa/ses langue(s) passive(s). En revanche, il sera capable de comprendre le message transmis via la langue passive en question, de sorte qu'il pourra reproduire ce message dans sa langue maternelle. 

Par exemple, en ce qui me concerne, le français est ma langue maternelle. C'est aussi la langue vers laquelle je traduis. Avec le temps, j'ai acquis des connaissances de l'allemand, de l'anglais et de l'espagnol qui me permettent de comprendre ces langues à l'écrit, et de reproduire en français un message rédigé en allemand, en anglais ou en espagnol que l'on m'aura chargé de traduire. 

On ne s'improvise pas traducteur

Même si elle consiste à rédiger un texte en langue maternelle, la traduction, ça s'apprend. On ne s'improvise pas traducteur, tout du moins si ce qu'on attend est une traduction de qualité. Raison pour laquelle plusieurs universités à travers le monde proposent des études de traduction. C'est notamment le cas de l'Université de Genève (Suisse) par l'intermédiaire de sa Faculté de traduction et d'interprétation

Il est donc faux de dire qu'un traducteur sait parler plusieurs langues, car, pour un traducteur, "savoir parler une langue", cela signifie "maîtriser la langue en question", et dans 99,9% des cas, seule la langue maternelle peut être maîtrisée. Bien entendu, un traducteur pourra avoir des compétences de communication dans d'autres langues que sa langue maternelle, mais au même titre que pourra en avoir un non-traducteur...

Et attention: traducteur et interprète ne sont pas une seule et même réalité. Le casque et le micro, c'est l'interprète; l'écran d'ordinateur et le clavier, c'est le traducteur. 

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